S'il y a bien une partie du travail d'enseignant qui ne plaisait pas à Tae-Won, c'était bien celui de la paperasse qui en découlait. Seul dans la salle des profs, avec comme seul bruit brisant le silence celui de son stylo qu'il ouvrait et fermait machinalement, l'ancien super-héros corrigeait des copies de ses élèves, suite au test d'évaluation pour pouvoir un peu jauger les futures recrues. Comme chaque année, il y avait des bons et des moins bons, mais tous avec l'espoir d'atteindre le haut de classement.

Une nouvelle copie atterri sur la pile qui ne cessait de grandir, fait assez amusant, l'autre pile de son côté ne semblait pas diminuer au fur et à mesure, tels un Sisyphe scolaire qui ne voyait jamais son calvaire s'arrêter. Tae-Won prit un nouveau dossier et l'examina un moment, en soupirant au vu du nom écrit sur ce dernier. Il ne faudrait pas longtemps à quiconque pour comprendre le lien entre cet élève et ce professeur, partageant le même patronyme. Il aimait sa fille, à n'en point douter, depuis le jour où elle a été adoptée, mais depuis qu'elle s'était mise en tête de marcher dans les pas de son père, il ne pouvait que s'inquiéter un peu plus que de raison.

Après tout, c'était en tant que super-héros qu'il avait eu son terrible accident, le collant à cette place de simple professeur – une position qui lui plaisait davantage, il fallait bien l'avouer – mais qui voudrait que sa descendance se blesse, voir même pire. Il ne voulait pas lui refuser d'être une héroïne, loin de là. Elle en avait le tempérament, un peu trop même, c'était là le problème. Depuis qu'il avait pris ses fonctions dans l'établissement, il s'efforçait de mettre l'accent sur la sécurité des héros et sa fille était… bien loin de ce concept.

Il laissa la copie sur le bureau et s'effondra sur le dossier de son siège. Il était temps pour lui de faire une pause. Après s'être étiré, Tae-Won se releva et se dirigea vers la machine à café posé dans le coin détente de la salle. Il se saisit de la cafetière et commença à se verser le fond de cette dernière dans sa tasse. Il apporta le récipient à ses lèvres et pu se délecter de ce délicieux café… du moins, il imaginait qu'à un moment donné, il avait été délicieux… actuellement, il était froid et laissait un arrière-goût en bouche. L'évier allait avoir tout le loisir de s'en repaître.

Le regard du professeur se posa alors sur l'immense horloge qui trônait au-dessus de la porte d'entrée. Elle était silencieuse depuis qu'un élève possédant une ouïe surdéveloppée s'était plein du bruit assourdissant qu'elle produisait alors qu'il se trouvait à l'opposé du bâtiment. Si son horaire lui avait permis de finir un peu plus tôt ce jour-là, on approchait de l'heure décisive à laquelle les élèves allaient pouvoir rentrer chez eux. Enfin, pas tous, car il avait demandé à l'une d'entre eux de les rejoindre après les cours.

Il en avait entendu parler par son collègue, le professeur de la première A et il semblait être plus à même de parler avec elle, étant également la fille d'un super-héros réputé comme lui. Il retourna à son bureau pour fouiller dans l'un des tiroirs, sortant le dossier complet qu'il lui avait été transmis. Il le parcourut brièvement pour prendre les informations générales à son sujet, mais n'eut guère le temps d'en faire plus que trois coups se firent entendre depuis la porte. "Je t'en prie, entre." Accompagnant ses paroles, il alla se saisir de la poignée et ouvrit la porte, laissant apparaître la jeune étudiante

Une nouvelle année scolaire avait démarrée, de nouveau les cours et tout le train-train quotidien. Voilà quelques semaines que j'étais élève - ou étudiante, je ne savais pas trop - à la UA University. Encore aujourd'hui je ne savais pas comment j'avais fait pour être acceptée, pour passer le teste d'entrée. Ma mère m'avait inscrite en douce pour passer les tests d'entrée des deux écoles de super-héros. J'avais donc passé les deux examens d'entrées et j'avais été accepté dans les deux. J'avais eu le luxe de choisir dans quelle école aller. J'avais choisi de venir à la UA University, car c'était ici que mon père avait fait ses classes pour devenir un héros.

Être ici dans ces couloirs, marcher dans ses pas. Cela me semblait irréel, comme si c'était un rêve, ou que quelqu'un me faisait une immense blague. Chaque jour, je m'attendais à ce que cela disparaisse, s'arrête brusquement pour x raison. Je voulais juste rendre mes parents fiers, être digne d'être leur fille. En plus de vouloir faire mes preuves, ma mère travaillait ici, comme professeur. Je devais avoir un comportement irréprochable pour ne pas salir sa réputation. Cela m'angoissais tellement.

Cette angoisse avait atteint son paroxysme quand j'ai eu une convocation auprès d'un professeur. Dans ma naïveté au début j'ai cru que c'était juste ma mère qui voulait me voir, me parler. J'avais vite déchanté en voyant que c'était avec un professeur que je ne connaissais pas.


Après la fin de cours je me dirige silencieusement et en imaginant le pire jusqu'à la salle des professeurs. Devant cette fichue porte, je fixe le vide pendant plusieurs minutes. Aller Anna, tu peux le faire ! Je flippais tellement, être convoqué comme ça si tôt dans l'année ce n'était pas bon signe. J'avais quelque chose de mal, j'allais être viré. En fin de compte je n'avais pas ma place ici. La triste réalité me rattrapais. Mes parents allaient être déçût. Je donne trois coups sur la porte. J'attends que la porte s'ouvre, et je voie un professeur que je n'avais jamais vu. Je baisse les yeux et timidement j'entre dans la pièce.

La jeune fille entra dans la salle des profs, le pas assez lourd et la tête admirant le sol. Pourtant, le carrelage n'était pas à ce point exceptionnel, plutôt banal même, alternant le blanc et le noir comme un échiquier géant, de très mauvais goût finalement. Le plus vraisemblable serait de penser que le professeur impressionnait la jeune étudiante même si sa stature était loin de certains autres professeurs ou héros, il était même plutôt sec et ses vêtements ne laissait que peut paraître la musculature qui se cachait en dessous. Rajoutons à cela une bouille qui était bien plus souvent reconnue pour sa sympathie que pour sa dureté. En un mot comme en cent, il fallait vraiment y mettre du sien pour être impressionné par JetStream.

Dépassant Anna, après avoir refermé la porte derrière elle, il tira une chaise face à son bureau. "Je t'en prie assieds-toi." Dit-il en pointant la chaise d'un geste de la main. Il fit le tour pour prendre également place, retournant rapidement les dossiers qu'il avait face à lui pour retrouver précisément celui de la principale intéressée. "Ah voilà." S'exclama-t-il en levant l'objet de ses désirs tel un archéologue découvrant le saint graal.

Il l'ouvrit et le posa devant lui avant d'afficher à l'attention de son interlocutrice un sourire se voulant rassurant, même si le résultat devait sans doute être plus gênant qu'autre chose. "Mademoiselle Mills, comment allez-vous ?" Il attendit patiemment sa réponse avant d'enchaîner. "Ne vous en faîte pas, vous n'avez rien fait de mal." Il essayait tant bien que mal de briser la glace et de rassurer Anna dont l'angoisse ne semblait pas décroître.

"Si je vous ai…" le mot convoqué faillit quitter ses lèvres mais il se rattrapa dans l'instant, craignant que ce terme ne soit pas le meilleur choix au vu de la situation. "…demandé de venir, c'est parce que votre nom m'a interpellé." Il marqua une pause, tapotant du doigt sur l'inscription du dossier mentionnant le fameux patronyme. "Vous savez, j'ai connu votre père." Thunder Shield, son nom de super-héros, était le second au classement, autant dire celui devant l'enfant prodige aujourd'hui professeur. Connaitre était d'ailleurs un bien grand mot, les quartiers des deux héros étant assez éloignés. Ils s'étaient croisés d'ici et là lors de missions conjointes pour attraper un plus gros poisson et bien entendu en tant que top du classement, ils avaient souvent été associés.

Mais sa requête envers Anna n'était pas simplement pour se remémorer les moments passés avec son ascendance, mais plus vite pour parler de fils de super-héros à fille de super-héros. "J'espère que son nom ne vous met pas trop la pression." Après tout, il connaissait bien cette situation, lui qui avait grandi avec l'héritage d'un nom et d'une position. Son père avait attendu de grandes choses de lui. Aujourd'hui, la Corée avait un nouveau héros au sommet de son classement et le nom d'Aquawave n'était plus qu'une légende. Tae-Won prit un moment de réflexion, se reposant sur le dossier de son siège. "Vous savez, je crois que l'on a beaucoup de choses en commun."

Au fur et à mesure que je m'avance dans la pièce, je sens un poids de plus en plus lourd sur mes épaules. Je fixais le sol comme si c'était mon seul refuge, le seul recours que j'avais. J'avais horreur de cette sensation. C'était forcément grave si j'étais là, j'avais fait quelque chose de mal. Enfin, quelque chose de mal, comme ne pas avoir ma place ici, genre l'établissement s'était trompé sur mes notes pour le concours d'entrer. Même si j'étais terrifiée, j'étais prête à devoir quitter l'école. Je m'y étais toujours préparé, au fond de moi. Il fallait être honnête, je n'étais pas vraiment surprise. Je m'avance d'un pas lourd jusqu'à la chaise et m'assois, n'osant toujours pas le regardant directement. Préférant fixer les papiers qu'il y avait sur son bureau ou ses mains.
Comment j'allais ? Je devais répondre honnêtement ? Cela serait pas mal vu si je disais la vérité ? J'aimais pas ce genre de question venant d'inconnue, il fallait toujours faire attention à ce que je devais dire. C'était chiant et épuisant.

Les cours sont un peu stressant, mais j'ai l'habitude.

Lorsqu'il indique connaître mon père, instinctivement je relève la tête. J'arrivais enfin à le regarder, je sentais un peu de stress, mais ce n'était plus aussi lourd que lorsque je suis entrée. C'était plus léger, moins oppressant. Il y avait aussi de la curiosité aussi. J'avais plein de questions qui me venais à l'esprit. Est-ce qu'il avait travaillé directement avec lui ? Souvent ? Pendant longtemps ? Ils s'entendaient bien ? C'était une relation purement professionnelle ou amicale ? Je savais que beaucoup des professeurs de l'UA University étaient soit des héros en retraite ou des héros actifs. Je ne connaissais pas ce professeur, mais ma curiosité était piquée.

Puis j'eus l'impression de recevoir une douche froide. Il avait touché la vérité si vite, si facilement, alors qu'il ne me connaissait pas. C'était perturbant.....voir effrayant. Comment il avait sût ? Il était télépathe ?


Pardon... je ne comprends pas.....qu'est-ce que vous voulez dire ?

Je préférais jouer l'innocence que d'admettre qu'il avait raison. C'était quelque chose de personnel. Je ne voulais pas que cela soit sut, connu par d'autres personnes. C'était quelque chose que je gardais pour moi, il y avait que mes parents qui savaient réellement ce qui se passait dans ma tête. Je n'aimais pas partager ce genre de choses avec des inconnus, qu'ils soient de mon âge ou adultes.

L'ancien héros se bascula vers l'arrière, tentant de bien choisir ses mots. Il avait bien compris que face à lui ne se trouvait pas l'élève la plus détendue de l'établissement. Un comportement qu'il avait du mal à concevoir de son point de vue, lui qui, même avec le poids qu'il avait sur les épaules, avait toujours été au-dessus du lot. Ça plus la nonchalance légendaire dont il pouvait faire preuve au quotidien. Non, le tact allait être de mise pour ne pas la faire fuir en courant, avec le risque de ne plus la revoir dans l'établissement.

L'histoire de Tae-Won était assez connue publiquement, lui qui était l'enfant prodige autant que la damnation de sa famille. Du moins, c'est ce qu'il pensait, mais visiblement, la jeune génération ne semblait pas s'embarrasser des anciennes gloires. À qui pouvait-on bien jeter la pierre, après tout, ce n'était que l'ordre naturel des choses. La main de l'ancien héros passa derrière son crâne afin de frotter son cuir chevelu, témoin silencieux de la bataille intérieure qu'il menait plus d'âme que de corps.

"Il y a près de 40 ans, il y avait un héros légendaire en Corée. Je doute que tu en aies déjà entendu parler, ça fait bien longtemps qu'il est à la retraite maintenant." Actuellement, le premier héros du pays natal était un marionnettiste dont la renommée dépassait les frontières, plus pour sa carrière de chanteur qu'il pratiquait comme passe-temps que comme héros. Là aussi, les temps changeaient, l'époque où les héros étaient de vrais Hwarang des temps moderne, respectant la tradition avait laissé place à de véritables stars de magazine people. "Il se nommait Aquawave et a tenu le haut du classement pratiquement toute sa carrière."

La force du père de Tae-Won était tellement impressionnante qu'il était presque reconnu dans son pays comme le meilleur super-héros au monde. Mais c'était aussi sans doute un peu de chauvinisme coréen. Le professeur observa la jeune étudiante pour voir sa réaction face à son habile capacité à tourner autour du pot.[/i] "Ce héros avait un fils, sur qui il fondait beaucoup d'espoir et qui aurait dû le remplacer à la tête du classement pour continuer son héritage." C'était là l'enfant prodige qui, à peine la découverte de ses pouvoirs était déjà la proie des paparazzis. Et l'entraînement qu'il avait subi durant toute son enfance en avait fait un combattant supérieur à son père, autant dire que niveau pression, elle se posait là également.

"Et bien ce fils, c'était moi… Et comme tu peux le constater, les choses ne se sont pas tellement déroulé comme prévu." Et voilà pourquoi il avait amené à la damnation de sa famille, quittant le pays pour s'installer aux Etats-Unis et n'arrivant à se hisser qu'à la troisième place du podium, pas qu'une autre place eu quelconque importance à ses yeux.

Fixant le col de sa chemise, pour ne pas croiser son regard. Je sentais quand même son regard sur moi, comme s'il m'analysait, ou essayait de voir quelque chose de non visible, d'entrer dans ma tête. Je commençais vraiment à croire qu'il devait avoir un alter de télépathie. Ou dans le même genre. Je n'aimais pas vraiment cette sensation, pendant un moment j'ai eu l'impression que je passais un test de vérité ou un interrogatoire.

Malgré ma sensation de mal être, j'écoute attentivement ce qu'il me dit, avec même une pointe de curiosité. J'étais curieuse à la fois de l'histoire, mais aussi où cela pouvait bien mener. J'étais bien plus à jour sur l'histoire des héros dans notre pays et en France, car c'était lié à ma vie personnelle et mon histoire. Mais un pays comme la Corée était inconnue pour moi, enfin en dehors du savoir de la culture populaire, ce qui pour moi se réduisait à la K-Pop et au K-drama. Bien que je ne connaissais rien sur ce pays et que je ne comprenais pas où il menait cette discussion, ma curiosité était suffisamment piquée pour remplacer le stress que je ressentais.

Vous.....êtes issue d'une famille de héros ?

Dans un sens ce n'était pas si surprenant. Beaucoup de jeunes au fils des générations voulaient suivre l'exemple d'un parent qui était un super-héros, que cela soit de la famille proche ou non. J'en étais un parfait exemple. Je voulais devenir un héros pour aider les gens, me sentir utile, mais aussi le désir de suivre l'exemple de mon père. C'était plus qu'une vocation, c'était un besoin.

Mais....vous avez dit avoir connue mon père......donc....vous avez été un très bon héro, non ?

Il avait dû être suffisamment haut dans le classement pour connaître suffisamment mon paternel. Il était devenu professeur dans une des meilleures écoles de super-héros du pays. Pour moi, il avait plutôt bien réussis sa vie. Il l'avait juste faite dans un autre pays que le sien. C'était si grave? J'étais un peu perdue, perplexe par sa manière de raconter les choses. Où est-ce qu'il voulait en venir ? Il pensait qu'on se ressemblai à cause de ça ? D'après ce que j'avais compris.... il n'avait pas eu le choix, son père avait décidé pour lui. Ce qui n'était pas mon cas, c'était même l'inverse.